Améliorer sa démarche qualité en EHPAD : entre projet d’établissement et évaluation médico-sociale

La réévaluation ou l’élaboration de votre projet d’établissement peut-elle être une opportunité pour vous préparer à votre évaluation médico-sociale future ? Dans ce billet, notre expert vous illustre comment l’association de ces deux démarches peut être bénéfique pour améliorer ou mettre en œuvre votre démarche qualité et les impacts positifs que cela aura sur vos parties prenantes.

Évaluation et projet d'établissement : deux démarches, mais des objectifs communs

La réforme de l’évaluation des ESMS issue de la loi du 24 juillet 2019 a conduit la HAS à rédiger une nouvelle procédure d’évaluation et à publier un référentiel commun à l’ensemble des ESMS. Cette réforme prévoit une périodicité plus rapprochée puisqu’elle impose aux établissements un calendrier quinquennal, en lien avec le renouvellement des CPOM et par conséquent des autorisations d’ouverture tous les 15 ans.


Le projet d’établissement, quant à lui, est régi par le Code de l’Action Sociale et Familiale qui impose à chaque établissement ou service social ou médico-social, d’élaborer un document définissant à l’issue d’un diagnostic, la stratégie de l’ESMS pour les 5 ans à venir. Il va décrire la feuille de route opérationnelle pour y parvenir. Il exprime ainsi la vision, les valeurs, les missions, et les objectifs spécifiques de la structure en intégrant les attentes des résidents, des familles ainsi que des professionnels.
On pourrait donc dire que :

  • L’évaluation médico-sociale c’est le contrôle technique qui va venir vérifier que tout fonctionne bien : 139 points de contrôle « standards » et 18 points de contrôle « impératifs » qui, s’ils ne sont pas satisfaits, impliquent la mise en place d’actions spécifiques dans la continuité immédiate de la visite d’évaluation.
  • Le projet d’établissement quant à lui c’est votre destination ! Et là, c’est vous qui choisissez l’ambiance !
  • Enfin, vos indicateurs qualité, c’est votre tableau de bord, essentiel pour maintenir le cap. Ils vont venir mesurer l’impact de vos actions.
    Par conséquent avant de choisir votre destination, il va falloir vérifier si votre structure répond aux standards de qualité actuels qui sont traduits par ce nouveau référentiel.

Le combo gagnant pour l’amélioration de sa démarche qualité

Cette démarche stratégique d’associer l’auto-évaluation à la réévaluation/élaboration de votre projet d’établissement transforme le processus d’évaluation en une démarche intégrée et proactive qui s’inscrit dans les enjeux stratégiques de l’établissement. Le projet d’établissement devient le reflet d’une démarche d’amélioration continue de la qualité inscrite sur une feuille de route opérationnelle.

En somme, le combo préparation au projet d’établissement et à l’évaluation médico-sociale vous permet de :

  • Etablir un diagnostic précis de votre établissement, de votre territoire et plus globalement des opportunités et menaces du secteur en alliant à la fois les exigences du référentiel, les recommandations de bonnes pratiques, mais aussi un avis de l’ensemble des parties prenantes.
  • Apporter de la cohérence dans la définition de vos axes stratégiques puisque le référentiel fait référence à des exigences liées à la stratégie et la politique de l’établissement qui doivent par conséquent être développées dans le projet d’établissement.
  • Renforcer la culture qualité : en intégrant la préparation à l’évaluation dans le projet stratégique, l’établissement renforce sa culture qualité. Chaque action entreprise dans le cadre du projet contribue à l’amélioration continue de la qualité.
  • Optimiser vos ressources :
    • Réaliser ces deux exercices simultanément permet de réduire le temps mobilisé de l’ensemble des parties prenantes et par conséquent les coûts associés à ces démarches.
    • L’intégration précoce des critères du référentiel de la HAS dans le projet d’établissement permet une gestion plus efficiente des ressources. En identifiant les besoins en personnel, en équipements et en formations requis pour répondre aux critères de qualité, l’établissement peut planifier de manière proactive les dépenses pluriannuelles, évitant ainsi des ajustements au coup par coup et plus coûteux.
    • Elle engendre également des bénéfices substantiels en termes d’efficacité opérationnelle et de qualité des prestations.
  • Avoir une réactivité améliorée : l’élaboration d’un projet d’établissement en parallèle à l’évaluation renforce la réactivité de l’équipe face aux enjeux identifiés lors de l’évaluation. Les actions correctives sont déjà envisagées et peuvent être mises en œuvre plus rapidement.
  • Optimiser vos processus : la démarche d’évaluation et le projet d’établissement partagent souvent des objectifs communs, tels que la personnalisation de l’accompagnement, la bientraitance …. En les réalisant simultanément, les processus peuvent être optimisés, évitant ainsi une duplication des efforts.
  • Développer ou renforcer une gouvernance partagée : l’élaboration d’un projet d’établissement implique l’ensemble des parties prenantes (professionnels, résidents et familles, partenaires). En combinant cette démarche avec la préparation à l’évaluation, les parties prenantes sont mieux informées, conscientes des enjeux, et davantage impliquées dans la démarche qualité.

Un diagnostic basé sur les critères du référentiel, mais pas que...

Vous l’aurez compris, réaliser une auto-évaluation basée sur le nouveau référentiel qualité en utilisant les 3 méthodes d’évaluation (l’accompagné traceur, le traceur ciblé et l’audit système) va constituer une base de réflexion à partir de laquelle vous allez pouvoir définir vos enjeux stratégiques inscrits dans votre projet d’établissement. Mais ce diagnostic ne doit pas s’en tenir à une auto-évaluation basée uniquement sur les critères de ce référentiel.

  • Un certain nombre de thèmes, pourtant incontournables dans la réflexion stratégique d’un projet d’établissement, ne sont pas ou peu abordés, car ce référentiel constitue une base commune à l’ensemble des ESMS.
  • Certains critères sont très génériques et nécessiteront dans le cadre de votre projet d’établissement d’aller plus loin dans le diagnostic pour définir une feuille de route opérationnelle.
  • Parfois certains critères ne vous parleront pas. Pas de panique ! Prenez le temps de les étudier en amont. Utilisez le manuel d’évaluation de la qualité des ESMS qui détaille les clés de compréhension pour chacun des critères. Reformulez afin de faciliter la compréhension des attentes pour l’ensemble de vos parties prenantes.
  • Enfin, adaptez les exigences du référentiel au public que vous accueillez ainsi qu’à vos moyens.

Un diagnostic à étoffer grâce à une myriade de recommandations de bonnes pratiques et d'outils de réflexion

Pour aller plus loin dans la phase de diagnostic et afin de constituer la base de réflexion de votre projet d’établissement, vous pouvez utiliser la méthodologie suivante :

1/ Pour le projet de soin, questionnez les critères du référentiel de la qualité des ESMS sur les thèmes « l’accompagnement à l’autonomie »,  « L’accompagnement à la santé », « la continuité et la fluidité des parcours des personnes ». Vous pouvez aussi vous aider :

  • Du guide des « Bonnes Pratiques de soins », en identifiant pour chaque risque gériatrique (chute, dénutrition, escarre…) si vos protocoles sont à jour, si les professionnels sont régulièrement sensibilisés et surtout si ces recommandations sont respectées par l’ensemble de l’équipe
  • Des indicateurs présents sur le logiciel de soins (pourcentage de résidents dénutris, nombre de chutes, pathologies des résidents accompagnées, GMP et PMP… en appréciant ces données sur plusieurs années)

2/ Pour le projet social, questionnez les critères du référentiel de la qualité des ESMS sur le thème  « la politique ressources humaines de l’ESMS ». Puis allez glaner des renseignements sur les sites de :

  • L’ANACT, où de nombreux outils gratuits vont vous permettre de construire votre stratégie QVCT « Qualité de Vie et Conditions de Travail » et votre politique managériale
  • L’ANAP, qui a également développé un certain nombre d’outils relatifs aux ressources humaines, comme « bâtir sa politique d’attractivité RH et de fidélisation »

3/ Pour le projet de vie et d’animation, questionnez les critères du référentiel de la qualité des ESMS sur les thèmes «  l’expression et la participation de la personne » et « la co-construction et la personnalisation de son projet d’accompagnement ». Interrogez également vos résidents et leurs familles sur leurs envies, car ils sont souvent source d’inspiration ! Puis plongez-vous dans les nombreuses publications de l’ANESM afin de vous interroger sur vos pratiques :

4/ Pour le volet écoresponsable ou responsabilité sociétale des entreprises (RSE), questionnez le critère 3.15.1 « L’ESSMS définit et met en œuvre sa stratégie d’optimisation des achats et de développement durable ». Puis explorez :

  • Les nombreux outils de l’ANAP en matière de Responsabilité Sociale et Environnementale
  • L’autodiagnostic MODD (Mon Observatoire du Développement Durable) afin d’évaluer votre niveau de maturité sur les différents volets du développement durable et identifier des axes d’amélioration

5/ Pour le volet éthique et bientraitance, questionnez les critères du référentiel de la qualité des ESMS sur les thèmes « La bientraitance et l’éthique » et « Les droits de la personne accompagnée ». Le nouveau référentiel qualité est fondée sur une approche globale de la personne et porte sur 4 valeurs :

  • Le pouvoir d’agir de la personne
  • Le respect des droits fondamentaux
  • L’approche inclusive des accompagnements
  • La réflexion éthique des professionnels

Par conséquent appuyez-vous sur les critères de ce référentiel, suffisamment étoffé pour construire vos axes d’amélioration en matière d’éthique et de bientraitance.

 

Zoom sur la loi   Pour rappel, la loi n°2022-140 du 7 février 2022, impose que chaque projet d’établissement :

  • précise la politique de prévention et de lutte contre la maltraitance mise en œuvre par l’établissement ou le service, notamment en matière de gestion du personnel, de formation et de contrôle ;
  • désigne une autorité extérieure à l’établissement ou au service, indépendante du Conseil départemental et choisie parmi une liste arrêtée conjointement par le Président du Conseil départemental, le représentant de l’Etat dans le département et l’agence régionale de santé, à laquelle les personnes accueillies peuvent faire appel en cas de difficulté et qui est autorisée à visiter l’établissement à tout moment.

Comment associer ces démarches au service de la qualité

Pour associer la démarche du projet d’établissement et de l’auto-évaluation sur la base du nouveau référentiel qualité des ESMS :

  • On sensibilise les professionnels, usagers et partenaires sur la réforme de l’évaluation médico-sociale dans une approche ludique et pédagogique. On en profite également pour rappeler les enjeux du projet d’établissement ainsi que les engagements pris par l’établissement et/ou le service dans le cadre du CPOM et expliquer les liens entre ces dispositifs.
  • On élabore un premier diagnostic issu des critères du nouveau référentiel de la qualité en s’appuyant sur les 3 méthodes d’évaluation et on se félicite pour tout le travail déjà accompli !
  • On complète ce diagnostic par toutes les thématiques que vous souhaitez intégrer et qui constitue selon vous un enjeu pour votre établissement en intégrant l’ensemble des parties prenantes (comme évoqué dans le précédent chapitre)
  • On définit à l’issue du diagnostic global nos enjeux stratégiques en les déclinant par une feuille de route opérationnelle fixant des pilotes ainsi que des échéances… et on essaye d’être réaliste
  • Et pour finir, on formalise :
    • Un plan d’action qualité qui répondra par conséquent à la fois aux attentes du référentiel qualité de la HAS, aux recommandations de bonnes pratiques, aux orientations des politiques publiques, ainsi qu’aux enjeux que vous vous serez fixés pour ces 5 prochaines années
    • Un projet d’établissement
    • Des comptes rendus synthétiques de groupe de travail (par exemple un tableau forces/axes d’amélioration) ainsi que l’émargement des participants.
Audrey SERRE

Audrey SERRE

Consultante Etude et Projets chez Gerontim - Juriste et diplômée en Santé Publique et organisation des systèmes de santé - Ancienne directrice d’établissement médico-social durant 8 ans, elle dispose également d’une expérience en gestion de projets de santé à l’international. Elle accompagne les établissements sur des questions à la fois stratégiques et organisationnelles.

Besoin d'un expert pour vous accompagner ?

Contactez-nous et calibrons ensemble une assistance sur-mesure qui réponde à vos besoins.
Partager
Facebook
Twitter
LinkedIn
Email
Imprimer la page
Retour en haut